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Université de Bordeaux
 

Manon Labarchède, jeune docteure intergénérationnelle

Manon Labarchède, jeune docteure intergénérationnelleCrédit photo : Forum urbain

Architecte de formation, Manon Labarchède a soutenu une thèse sur le sujet de l’habitat et de la maladie d’Alzheimer, pour laquelle elle a obtenu une bourse doctorale de la fondation Médéric Alzheimer. Portrait d’une jeune docteure au regard "spatial" sur les enjeux sociaux de l’habitat destiné à une population spécifique.

Entretien réalisé par Charlotte Hemery en 2018.
 
Quel est votre parcours ?

Je suis architecte diplômée d’État, sortie de l’École Nationale supérieure d’architecture et de paysage de Bordeaux (ensapBx) en 2015. Après mon diplôme, j’ai choisi de faire une année d’étude de sociologie pour élargir mes horizons. J’ai eu la chance d’intégrer le parcours "Études et diagnostics sociologiques" du master 2 "Problèmes sociaux et action publique" à l’Université de Bordeaux. Mon objectif était d’acquérir des outils méthodologiques que je ne maîtrisais pas du fait de ma formation en architecture. J’envisageais par la suite de faire une thèse, et Guy Tapie (un de mes anciens enseignants à l’ensapBx) m’a alors parlé de son projet de recherche partenariale sur l’habitat et le vieillissement, que j’ai rejoint avec enthousiasme à la fin de mon année de master. J’ai ainsi commencé en 2016 ma thèse intitulée "Les espaces de la maladie d’Alzheimer: conditions de vie, hébergement et hospitalité", sous la direction de Guy Tapie et de Muriel Rainfray[1].que j’ai soutenue le 26 janvier dernier.

Pourquoi et comment vous êtes-vous orientée vers la recherche ?

Le mémoire que j’ai été amenée à faire avec Patrice Godier durant ma formation à l’ensapBx a été un moment déterminant dans ma décision de faire de la recherche. Intitulé "L’implication des habitants dans la fabrique de la ville, analyse du processus de projet alternatif", celui-ci portait sur ce que j’appelle les "collectifs pluridisciplinaires", comme Bruit du Frigo à Bordeaux par exemple, qui regroupe des architectes et des artistes. Je m’intéressais à la mise en place de leurs projets, leurs outils et leur manière de collaborer avec les habitants. Mon projet de faire une thèse en a découlé assez naturellement.

A quels grands enjeux urbains vos travaux de recherche répondent-ils ?

Je travaille surtout sur la question de l’habitat. Je m’intéresse à son adaptation à la maladie d’Alzheimer, mais cette spécificité de la maladie nous amène à nous interroger plus globalement sur la place des personnes âgées dans la société à travers les différentes structures d’habitat qui leur sont proposées. Du fait de ma formation, j’aborde ces sujets avec une approche spatiale, en m’intéressant aux structures comme les EHPAD[2] et à la manière dont l’espace, à la fois conçu et vécu par les usagers, impacte la manière dont on voit ces établissements.

A quoi ressemble votre quotidien depuis la fin de votre thèse ?

Je termine actuellement l’année universitaire 2020-2021 car j’enseigne encore la sociologie et les méthodes sociologiques à l’ensapbx et l’Université de Bordeaux, ainsi qu’au CEF[3] de Bergerac où j’encadre une formation en lien avec mon sujet de thèse. Donc mon quotidien en ce moment se résume à beaucoup de préparation de cours en visioconférence. De plus, je participe au projet REDIVIVIUS 2 du laboratoire PAVE qui s’intéresse à l’adaptation du bâti né avec le mouvement moderne à l’après-guerre aux impératifs actuels de développement durable.

En complément de ce portrait, écouter l'interview de Manon Labarchède dans l'émission "Que cherchent-ils ?", diffusée le 02/08/2018 sur RCF Bordeaux.

Quel est selon-vous le rôle du chercheur ?

Je pense qu’aujourd’hui le rôle du chercheur est vraiment d’apporter des réponses aux questions que se posent les acteurs des politiques publiques et autres corps professionnels. A travers mes travaux de recherche, l’objectif est pour moi de proposer une expertise et un regard global permettant de faire bouger les choses. Cela suppose de travailler à la fois avec les professionnels de la ville et avec des chercheurs d’autres disciplines.

Quelles sont jusqu'ici vos plus grandes fiertés et réussites ?

Une de mes grandes fiertés est d’avoir obtenu une bourse doctorale de la Fondation Médéric Alzheimer pour mon projet de thèse. La Fondation ouvre tous les ans un appel à candidature pour des bourses doctorales, et je suis très heureuse d’avoir été sélectionnée en 2017 aux côtés de 3 autres doctorants. Remporter cette bourse a été pour moi très important car c’est valorisant de voir que mon travail intéresse, d’autant plus un organisme spécialiste des questions que je traite. J’ai pu terminer mon terrain au Canada où j’ai réalisé des observations et des entretiens au sein de la structure Carpe Diem[4] en juillet 2019 et j’ai poursuivi la rédaction de ma thèse malgré la Covid-19. Je suis plutôt contente d’avoir mené le projet à son terme. Ces quatre années ont été assez intenses et ma soutenance a été la concrétisation d’un travail personnel et d’un travail d’équipe avec le projet de recherche sur l’habitat et le vieillissement.

Quels sont vos projets pour l’avenir ?

Pour l’instant, je vais me lancer dans la valorisation de mes travaux de thèse, en particulier à travers la publication d’articles et à des communications dans des colloques. J'aimerai trouver un poste d’enseignant-chercheur. J’ai la chance d’enseigner à l’ensapBx depuis le début de ma thèse (notamment en sociologie et en médiation architecturale), et je souhaiterais idéalement continuer dans cette voie, tout en poursuivant mes travaux de recherche. Aussi, je tiens à maintenir des collaborations étroites avec le laboratoire PAVE.

Que représente pour vous le Forum urbain ? Que vous apporte-t-il en tant que doctorante ?

Grâce au Forum urbain, dès le début de ma thèse, j’ai eu la chance de réaliser une mission dans le cadre du colloque "Longue vie à Bordeaux Métropole" qui portait sur mon sujet de recherche et m’a permis de collaborer avec des acteurs locaux. Je trouve toujours cela intéressant de rencontrer des acteurs politiques et professionnels avec qui on partage des questionnements. On a aussi beaucoup collaboré dans le cadre du projet de recherche partenariale sur l’habitat et le vieillissement, notamment autour de l’organisation de séminaires qui sont venus alimenter la recherche auprès des élus et des acteurs locaux qui s’intéressent à ces questions et que le Forum urbain a réussi à identifier et relier à nos travaux. Le Forum urbain permet à son réseau d’universitaires d’apparaitre non seulement comme des chercheurs, mais surtout comme des ressources pour aider à la prise de décision urbaine. En ce sens, le lien avec les acteurs du territoire qu’offre le Forum est pour moi essentiel. 

Quelles sont les lectures qui vous ont particulièrement marquée cette année, en dehors des ouvrages scientifiques ?

Le livre de Léa Salamé, « Femmes puissantes », qui retranscrit des interviews de plusieurs personnalités issues de différents domaines interrogées sur la légitimité des femmes à exercer le pouvoir et la possibilité à se reconnaitre comme puissantes. Ce livre permet de découvrir des figures et des histoires intéressantes dont on n'a pas forcément connaissance dans leur biographie.


[1] Professeur des Universités à l’Université de Bordeaux et gériatre à l’hôpital Xavier Arnozan.
[2] Etablissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
[3]Centre de Formation au travail sanitaire et social.
[4] Située aux Trois Rivières, entre Québec et Montréal.


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